Entendons-nous sur ce qu’est le vin nature. Devant le manque de définition (et c’est tant mieux), il faut s’intéresser au travail du vigneron, s’informer, discuter et faire confiance à son caviste. C’est aussi cela être consommateur.
Le vin nature n’a pas ou peu d’intrant utilisé dans sa production, tant à la vigne qu’au chais. L’artisan qui le produit travaille la terre pour la rendre vivante (une extrême grande majorité des terres agricoles de notre pays sont dénuées de vie, ce sont juste des supports de culture boostés au vitamines vendues par les labos). Le vigneron "nature" connaît ses sols, ses parcelles, l’influence du climat, ses cépages, ses vignes et harmonise cet ensemble pour produire un vin digeste avec un fort coefficient de picolabilité.
L’univers du vin en France s’est construit sur la richesse géologique et la diversité des régions productrices, conférant ainsi aux vins un fort caractère territorial.
S’attaquer à la cause plutôt que soigner les symptômes
L’acte d’achat du vin se fait 5,5 fois sur 10 en grande surface[1], ou tout au moins seul, sans un accompagnement judicieux (un vrai conseil de passionné, pas fourni par un commercial déguisé en caviste avec un tablier bordeaux et un pin’s en forme de grappe). Notons au passage que pour conserver les vins en grande distribution, heureusement qu’ils sont protégés chimiquement, sinon comment résisteraient-ils à la station debout (pas seulement pénible, mais mortelle) et aux spots halogènes sensés les mettre en valeur ?
On voudrait donc nous faire croire que pour faciliter l’acte d’achat, tous les viognier devrait ressembler à une norme internationale du gout du viognier, genre abricot et violette, arômes qui s’ils ne sont pas naturellement présents par le simple travail du vigneron, peuvent être obtenus à renfort de levures exogènes et autres artifices. Posons nous la question suivante : la fraise Tagada a t’elle un gout de fraise ? Et répondons maintenant à celle ci : le viognier "oenologique" à t'il le gout du viognier ?
Le vin de cépage
Et puis pour que cela soit encore plus facilement reconnaissable, appelons le Viognier sur l’étiquette, comme cela pas d’erreur possible, si c’est écrit dessus c’est que s’en est !
Les vignerons qui travaillent leurs sols et produisent sans chimie des vins issus des cépages locaux et endémiques sont des bienfaiteurs de l’humanité. Non seulement ils perpétuent un savoir-faire, une certaine idée de l’agriculture, une connaissance alliant empirisme et savoirs scientifiques, mais ils nous permettent aussi d’avoir accès à des produits qui ont un goût, et sans eux, ces goûts disparaitraient sans aucun espoir de pouvoir les retrouver un jour.
Accessoirement leurs méthodes de production utilisent plus de bras que de machines, et ce n’est pas là le moindre mal.
Quand j’achète (et je bois) du vin nature, je permets à un artisan de continuer à travailler en étant d’être fier de ce qu’il fait, je contribue à sauver notre patrimoine gustatif, j’évite aux labos de continuer à appauvrir nos sols et polluer nos organismes[2], je créé du lien avec mon caviste, et surtout je continue à me faire plaisir en partageant des quilles avec des copains, sans peur du lendemain.
1) acte achat du vin : 55% en GD, 30% chez un caviste (Nicolas est-il encore un caviste ?), 10% chez le producteur. Baromètre SoWine 2015.
2) la vigne représente 3,7% des surface agricole mais consomme 20% des pesticides et fongicides utilisés.